Sept ans de réflexion auront mené à l’écriture du Guide des aidants par l’ergothérapeute Lisanne Rhéaume. Nous lui avons posé quelques questions sur cet ouvrage utile et très actuel attendu pour le 23 septembre.
Pourquoi avez-vous choisi de devenir ergothérapeute ?
Lisanne Rhéaume : Jeune adulte, je cherchais une profession qui me permettrait d’aider les autres. J’étais intéressée par le domaine de la santé. Cependant, je ne voulais pas travailler de nuit. C’est alors que j’ai découvert l’ergothérapie. Je n’avais aucune idée de ce que c’était; c’est d’ailleurs un secteur d’activité encore méconnu aujourd’hui. Il y avait de bons débouchés en ergothérapie, donc j’ai décidé de m’inscrire à un programme de formation, et j’ai été admise !
Pourquoi avoir écrit le Guide des aidants ?
L. R. : Lorsque j’étais à l’université, nous avions accès à des livres majoritairement écrits en anglais. Je m’en suis plainte auprès de la directrice du programme qui m’a répondu : « Si tu veux des livres en français, tu n’as qu’à en écrire ! » Bien des années plus tard, alors que j’avais accumulé beaucoup d’expérience sur le terrain, sa réponse trottait toujours dans ma tête. J’ai alors décidé de me mettre à l’ouvrage et sept ans plus tard, mon savoir est devenu accessible, en français, à tous ceux qui s’intéressent aux enjeux relatifs au maintien à domicile des personnes en perte d’autonomie.
Vous dites que ce livre est celui auquel vous auriez aimé avoir accès au début de votre carrière d’ergothérapeute. Pourquoi ?
L.R. : En début de carrière, il est difficile de savoir comment passer de la théorie à la pratique, comment s’y prendre, quoi faire concrètement et par où commencer. Mon manque d’expérience en soutien à domicile aurait été beaucoup moins stressant si j’avais eu accès à ce genre de livre, je veux dire un guide qui contient des solutions pratiques applicables dans la vraie vie et de nombreux exemples pour faciliter la compréhension des principes fondamentaux et des stratégies compensatoires. En écrivant cet ouvrage, je me revoyais dans mes premières interventions et j’imaginais combien cela doit être d’autant plus difficile quand on est un proche aidant sans aucune formation !
À qui est-il destiné ?
L.R. : Je l’ai écrit pour :
– les proches aidants qui sont confrontés à la perte d’autonomie d’un de leur proche, afin qu’ils sachent quoi faire et qu’ils se sentent moins seuls, moins démunis. C’est très utile d’avoir des réponses, des conseils, des idées accessibles sur sa table de salon, surtout compte tenu des délais d’attente pour obtenir l’aide d’un professionnel de la santé et des services sociaux;
– les étudiants et les professionnels de la santé en début de carrière qui interviennent auprès des personnes en perte d’autonomie, afin qu’ils aient accès à un livre de référence pratique pour les guider;
– les professionnels de la santé expérimentés qui ont besoin d’élargir leur champ de compétence, afin de mieux contribuer à l’autonomisation des personnes âgées ou handicapées;
– les intervenants des organismes communautaires et les fournisseurs de services qui côtoient cette clientèle et qui sont appelés à les conseiller;
– les leaders de notre société, afin qu’ils élargissent leur vision du soutien aux personnes en perte d’autonomie et qu’ils prennent des décisions éclairées quant aux besoins de cette population.
Peut-on réellement retrouver une bonne qualité de vie avec les solutions que vous proposez ?
L. R. : Ça dépend de ce que vous entendez par « qualité de vie ». Si vous voulez dire « participer à des activités plaisantes d’une manière différente, pouvoir sortir de la maison, avoir quelque chose à faire de ses journées, avoir des occasions d’éprouver du plaisir, être plus à l’aise dans sa vie de tous les jours, mieux dépenser son énergie, forcer moins, se déplacer plus loin, etc. », je crois vraiment que les stratégies proposées améliorent la qualité de vie des personnes en perte d’autonomie et celle de leurs proches aidants.
Que pensez-vous des centres d’hébergement et de soins de longue durée pour personnes âgées ?
L. R. : Ils sont absolument essentiels pour les personnes qui n’ont pas les ressources à domicile pour compenser une perte d’autonomie sévère. Cela dit, ce type d’établissement n’aura plus sa raison d’être le jour où chaque individu de notre société aura accès à l’aide dont il a besoin à domicile, peu importe la sévérité de sa perte d’autonomie. Malheureusement, je ne pense pas voir cela de mon vivant !
Selon vous, quelles vont être les retombées de la crise sanitaire dans les centres d’hébergement pour personnes âgées survenue lors de la pandémie ?
L. R. : Je pense que cette crise a sensibilisé nos gouvernements et l’ensemble de la population aux inconvénients relatifs au regroupement dans un même lieu de dizaines de personnes en perte d’autonomie et ayant une santé fragile. Cette sensibilisation permettra à tout le monde de mieux comprendre les avantages relatifs au maintien à domicile de ces personnes.
Pensez-vous que le maintien à domicile sera désormais privilégié, alors que depuis quelques décennies les centres étaient des options d’hébergement valorisées ?
L. R. : Absolument ! Avec le vieillissement rapide de la population, il sera impossible d’avoir de la place pour héberger toutes les personnes âgées ou en perte d’autonomie dans des milieux leur étant destinés. Les longues listes d’attente pour y accéder le prouvent déjà ! Notre société n’a pas d’autres choix que de développer les soins à domicile et les outils pour soutenir toutes ces personnes ayant besoin d’aide pour prévenir ou compenser des incapacités physiques ou mentales. J’y contribue par l’intermédiaire de ce guide !
Le Guide des aidants sera disponible dès le 23 septembre.